Alors rien, c’est ce mot là, tu vois, qui se glisse dans la conversation. C’est comme ça. Machinalement. On l’emploie, on le répète, on le dit, on l’écrit.
Et alors quoi ?
Ben rien justement, peut-être qu’on l’emploie à tort et à travers. On finit par ne plus savoir ce qu’il dit, à quoi il sert, quelle est sa fonction.
Il introduit la conversation lors de retrouvailles. Il s’enquiert. Il prend des nouvelles en marquant une inquiétude, une préoccupation. C’est qu’il est empathique aux limites de l’inquisition parfois le alors.
Je te l’ai déjà dit. Alors à quoi bon.
Jusqu’alors tu t’en fichais…
C’est vrai. Je n’y prenais pas garde. Ce n’est pas comme le « on » ou le « ça », c’est « alors »… ça se met à toutes les sauces.
Ça alors c’est extraordinaire !
Mais tu te rends compte ? On a pris à, on a pris lors. L’adverbe nous laisse dans l’expectative, mais peut venir nous inviter : alors, on danse ?
Mon vieux dictionnaire Littré de 1870 précise qu’il convient de ne pas faire la liaison entre le « s » et la la voyelle qui suivrait. Ce serait mal vu.
Alors, malgré tout, je me suis relu et il en venait un peu trop. D’ailleurs les répétitions, alors qu’on croit tout gouverner, elles reviennent subrepticement. Comme les tics de langage.
Par conséquent, il faut être prudent avec son usage. Mais remarquez à quel point le leader de la France Insoumise répète à l’envi « par conséquent » alors qu’il pourrait user d’un langage moins ronflant.
Alors écoute, tu feras comme tu pourras.
Tu regarderas comment il se glisse dans la conversation, alors tu seras étonné. Il est rarement mal orthographié. Peut-être lui donne-t-on une richesse qu’il n’a pas, y voyant de l’or à la fenêtre de la langue ?
Mais il est drôle à se mêler de choses diverses : nous dire le temps où nous étions, oser annoncer une conséquence, émettre une hypothèse, un choix entre deux variables, relier des éléments ou exprimer des sentiments… En connaissez-vous beaucoup d’aussi petits mots qui en disent autant et avec tant de nuances à l’oral qu’à l’écrit ?
Alors est un adverbe de théâtre, pour la comédie humaine, alors c’est pour ça qu’on l’aime bien.
Mon prochain fils, je l’appellerai Alors.
Ça ferait chic.
— Alors et Ça, avez-vous terminé vos devoirs ?
Alors ça recommence, il faut se fâcher si je comprends bien alors…
Alors ? C’est tout pour aujourd’hui !
